

À Fontainebleau, une IA sobre en énergie s'entraîne à détecter les feux de forêt
Au pied d'un pylône de plus de 40 mètres à Fontainebleau, l'intelligence artificielle logée dans un ordinateur de la taille d'une carte de crédit analyse les images des deux caméras perchées à son sommet. La moindre fumée détectée envoie un signal aux sapeurs-pompiers de Seine-et-Marne.
"Les caméras, qui capturent des images toutes les 30 secondes, sont analysées localement par le système d'intelligence artificielle embarqué sur ce micro-ordinateur", détaille Mateo Lostanlen, co-fondateur de Pyronear, une solution open source de détection précoce des feux de forêt.
En cas d'alerte, les pompiers prennent à distance le contrôle des caméras pour zoomer dans l'image et déterminer la taille et le lieu de l'incendie.
"L'enjeu est de déceler le départ d'un feu le plus précocement possible, pour mobiliser un minimum de pompiers et utiliser un minimum d'eau", explique le commandant Paul Laurain, sapeur-pompier et référent départemental feux de forêt au centre d'incendie et de secours de Fontainebleau.
Historiquement, la forêt de près de 25.000 hectares, connue pour ses chênes centenaires et ses amas rocheux prisés des grimpeurs, était surveillée pendant la période estivale par des étudiants, postés en haut de tours de guet en bois, du lever au coucher du soleil.
"L'humain va devenir passif dans le futur: l'intelligence artificielle lui permet de ne pas avoir à scruter en permanence les images", détaille le sapeur-pompier, qui teste le dispositif depuis mai en partenariat avec Pyronear et TDF, propriétaire des quatre pylônes où sont installées les huit caméras qui quadrillent la forêt.
En l'espace de quatre mois, le système commence déjà à faire ses preuves. Cet été, lorsque des promeneurs ont contacté les pompiers pour une odeur suspecte, la prise en main des caméras à distance a permis, grâce à "un système de triangulation, de localiser rapidement et avec précision le lieu du sinistre", explique le commandant Laurain, par ailleurs porte-parole des pompiers de Seine-et-Marne.
Le 14 juillet, l'analyse des images a également permis d'évaluer la densité de la fumée dégagée par l'incendie d'une voiture volée. Ce feu d'ampleur, pour lequel "plus de pompiers que prévu" ont été engagés, a ravagé 9.000 hectares de forêt.
- "Pas si intelligente" -
Condensation sur la caméra ou "nuages poussés par le vent", le système, encore en rodage, peut néanmoins générer des "faux positifs". Des travaux agricoles dégageant un gros nuage de poussière ont déjà donné l'alerte, déclenchant l'intervention d'une patrouille de l'Office national des forêts. "Une moissonneuse a laissé penser au système qu’il s'agissait d’un feu", explique le commandant Laurain.
Pour s'entraîner, l'IA développée par Pyronear doit deviner, à partir de milliers d'exemples, s'il y a un feu ou pas. "Si elle a raison, on la récompense. Si elle a tort, on la pénalise", résume Mateo Lostanlen. "On l’exerce jusqu'à atteindre un fort taux de succès", ajoute l'ingénieur de 32 ans.
Les images sur lesquelles s'entraîne l'IA proviennent de la base de données de Pyronear mais aussi de données publiques issues d'un réseau de caméras en Amérique du Nord. "L'IA n'est pas si intelligente que ça", explique-t-il, "elle a du mal à s'adapter à un nouveau contexte" et doit être réentraînée localement lorsqu'elle est utilisée dans une nouvelle région où le relief et le type de forêt sont différents.
"Ce qui permet aussi d'améliorer ses performances. D'où l'intérêt d'avoir des données venant d'un peu partout dans le monde pour proposer l'algorithme le plus performant possible pour le mettre en commun", ajoute-t-il.
L'IA développée par Pyronear fonctionne en local, sans stocker de données dans des data centers énergivores et son entraînement est ponctuel, de l’ordre de "quelques heures tous les deux mois", fait valoir M. Lostanlen.
Les caméras sont installées en 30 minutes sur des infrastructures existantes, un système "assez minimaliste en consommation énergétique", souligne de son côté le commandant Laurain, et qui sera opérationnel "dès l’été prochain".
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